Comment les Jeunes du Travail Organisé réagissent au COVID-19 en Afrique subsaharienne

Empêcher les travailleurs de risquer leur vie (dans les confinements et les conflits politiques) - d'Emmanuel Adjei-Danso, Président du Comité Industriel des Jeunes d’Afrique Subsaharienne

Metallarbeiter

Image: of IndustriAll Emmanuel Adjei-Danso et d'autres jeunes syndicalistes du Ghana s'organisent pour défendre leurs droits.

L'apparition soudaine de la pandémie de COVID-19 porte un coup sévère aux économies, aux entreprises et aux travailleurs en Afrique subsaharienne. Les pays limitent l'accès aux restaurants, aux salles de concert, à certains magasins de détail et à d'autres entreprises non essentielles où de grands groupes de personnes risquent d'entrer en contact étroit les uns avec les autres. Ces défis sans précédent ont des retombées économiques ; dans la mesure où des millions de personnes se retrouvent soudainement sans emploi, avec une forte possibilité d’une augmentation significative du chômage.

Selon les prévisions de la Banque Mondiale, la perte économique de COVID-19 pour la région se situe entre 37 et 79 milliards de dollars américains de pertes de production pour 2020 en raison d'une combinaison d'effets et également du fait des mesures de confinement et de la réaction du public.

Alors que la plupart des pays de la région ont été touchés par la pandémie à différents degrés, la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel est prévue pour chuter en particulier fortement dans les économies subsahariennes. COVID-19 a frappé aussi bien la majorité des travailleurs sur le marché du travail formel que ceux du secteur informel ; pendant que beaucoup plus ont perdu leur emploi dans les secteurs informels en même temps que l'avenir semble toujours sombre.

Les travailleurs en emploi sont également confrontés à plusieurs conséquences telles que des réductions de salaire et la suppression d'autres allocations qui faisaient partie de leurs revenus. Le pouvoir des syndicats peut baisser si des mesures drastiques ne sont pas prises pour sauver les emplois le plus tôt possible.

En évaluant la réponse des gouvernements de l’Afrique subsaharienne aux mesures prises, nous pensons que l’adoption d’une approche unique ne sera d'aucune utilité et un confinement complet pourrait ne pas être la meilleure décision pour l'Afrique. Pendant que les cas de coronavirus augmentaient à Wuhan en janvier, la Chine a décidé d'imposer un confinement total. Dans un pays où plus de 23% de la population ont plus de 55 ans, le gouvernement a introduit de sévères restrictions pour atténuer la propagation de la maladie et éviter de submerger le système de santé. Pendant que la maladie se répandait dans d'autres parties du monde comme le Japon, l'Europe et les Etats-Unis - qui ont tous des populations encore plus âgées que celle de la Chine - ont utilisé la même stratégie.

Aujourd'hui, de nombreux gouvernements africains ont également imposé des mesures de confinement pour faire face à la pandémie. Pourtant, ces pays ont une démographie d'âge radicalement différente de celle de l'Asie et de l'Europe. En explorant la démographie d'un continent dont l'âge moyen est inférieur à 20 ans, nous avons besoin de définir les mesures de confinement adaptées à notre contexte. A mon avis, les mesures de distanciation sociale, la sensibilisation à la maladie et le port obligatoire de masques dans le monde du travail pourraient être un bon point de départ pour la réouverture des marchés africains, pendant que les frontières restent fermées jusqu'à nouvel ordre. Pour les gouvernements africains, cela devrait être un avertissement aux fins de la ratification de la Convention sur la Sécurité et la Santé au Travail (C-155) et la Convention sur la Sécurité et la Santé dans les Mines (C-176) pour s’assurer que les employeurs prennent les mesures de sécurité au sérieux après le redémarrage de nos économies.

Au Ghana, les syndicats organisés en collaboration avec le gouvernement viennent d'annuler le confinement dans la mesure où davantage de travailleurs risqueraient de perdre leur emploi. Les parties ont l’intention de développer une approche contextuelle pour faire face aux crises à travers des plateformes de dialogue social.

Plusieurs pays africains se sont adressés au Fonds Monétaire International pour des décaissements afin de réduire l'impact économique et financier de la pandémie de COVID-19. Le Maroc, la Tunisie, Madagascar, le Rwanda, la Guinée, le Gabon et le Sénégal font tous partie des pays bénéficiant d'une assistance, tandis que le Ghana reçoit la plus grosse somme d'environ un milliard de dollars américains. D'autres pays devraient suivre, le Nigeria et le Tchad faisant tous deux des demandes d'aide.

Je m'attends à ce que nos gouvernements utilisent ces fonds du FMI pour déployer un plan de stabilisation. Les fonds devraient en grande partie cibler les forces motrices de la croissance économique et non orientés vers la consommation des ménages. Compte tenu du fait que les pays sont susceptibles d’enregistrer une baisse de la croissance du PIB, je propose donc un modèle de réorganisation qui relancera les entreprises du secteur formel - et en particulier - du secteur informel, et que cela se fasse par le dialogue entre le gouvernement, les employeurs et les syndicats.

Le travail organisé devrait en permanence échanger avec le gouvernement et les employeurs sur les plans de sauvetage et également mettre au point une approche spécifique au pays pour faire face aux pertes d'emplois et à un monde du travail post-corona. Les fonds destinés aux économies doivent être débattus entre les partenaires sociaux pour examiner le moment du déblocage de ces fonds aux entreprises, car le moment joue un rôle important pour la relance des entreprises.

Dans des pays comme le Ghana, où l'on ne sait toujours pas si les élections prévues auront lieu cette année, les gens se demandent à quoi pourrait ressembler le pays sans président. C'est donc le moment pour les syndicats organisés de rassembler les gens dans l'espace politique pour empêcher les travailleurs de risquer leur vie dans des conflits politiques - jusqu'à ce que le système politique reprenne son cours.
 

Emmanuel Adjei-Danso est le Président du Comité Industriel des Jeunes d’Afrique Subsaharienne. Cette structure des jeunes a été créée en octobre 2019 avec l’appui de la FES et est composée de représentants de sept pays africains, dont la majorité est constituée de jeunes femmes.


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