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Politik und Gesellschaft Online
International Politics and Society 2/1998
Matthes Buhbe
La Turquie et les frontières de l'intégration européenne

Lors du Sommet de Luxembourg de 1997, l'Union européenne a décidé de ne pas faire participer la Turquie aux prochaines étapes d'élargissement. Cette décision est pertinente pour plusieurs raisons. 1) Dans sa composition politique actuelle, la Turquie ne cadre pas avec l'UE; car l'UE est par essence la réunion des démocraties européennes, tandis que la Turquie est encore marquée par le républicanisme kémalien, dans lequel la démocratie joue un rôle subordonné. 2) Une adhésion de la Turquie confronterait l'UE à des problèmes de sécurité politique complexes, pour lesquels elle n'est actuellement pas du tout armée (question chypriote, conflit égéen avec la Grèce, problème kurde, utilisation conflictuelle de l'eau du Tigre et de l'Euphrate). 3) La disparité de développement économique entre l'UE (y compris ses États membres pauvres) et la Turquie pèserait trop lourd sur les mécanismes de solidarité et sur la volonté d'intégration de l'Union, d'autant plus que la population turque est nombreuse et en croissance rapide. L'antagonisme culturel auquel on se réfère entre une Europe chrétienne et une Turquie musulmane n'est en revanche pas une objection valable à une adhésion à l'UE. L'élément décisif réside bien davantage dans le fait que la religion quelle qu'elle soit joue dans une société économiquement "retardataire" un tout autre rôle que dans une société industrielle très développée. Toutefois, même sans perspective d'adhésion à court terme, la Turquie demeurera certainement partenaire de l'UE, car une stratégie consistant à se détourner de l'Europe ne pourrait lui être profitable. La Turquie ne pourrait notamment pas s'assurer de position acceptable dans le monde musulman, dans un grand regroupement turc ou dans une union néo-ottomane autour de la Mer Noire. En tant que puissance régionale avec de multiples fonctions de passerelle, la Turquie aurait intérêt à poursuivre l'amélioration de ses relations avec l'UE. La politique européenne ne devrait pas, quant à elle, prendre le parti du kémalisme contre celui de l'islamisme.


© Friedrich Ebert Stiftung | technical support | net edition bb&ola | April 1998